Le contenu de cette page nécessite une version plus récente d'Adobe Flash Player.

Obtenir le lecteur Adobe Flash



 
Union Générale des
Travailleurs de Côte d'Ivoire
Siege Social
Bourse du Travail de Treichville
Adresse
05 BP 1203 Abidjan 05
Téléphones
(225) 21 24 09 78
(225) 21 24 10 12
(225) 21 24 16 95
Fax
(225) 21 24 08 83
Site Web
www.ugtci.org
Email
ugtcisg@yahoo.fr
 

Adé Mensah (secrétaire général de l’Ugtci) :
« A l’extérieur, on estime que personne ne peut aller contre celui que le monde reconnait comme président »
« La situation des travailleurs est intenable »

Jeudi 20 Janvier 2011
 

Secrétaire général de l'Union générale des travailleurs de Côte d'Ivoire (Ugtci). Ade Mensah se dit prêt a parler a toute presse qui l'approche. Mardi dernier, il s'est prêté aux questions de "Le Nouveau Réveil". Sans faux-fuyant, le patron de la plus grande Centrale syndicale de Côte d'Ivoire a parlé de la crise post-électorale qui secoue son pays et cause beaucoup de torts aux travailleurs.

M. le Secrétaire général de l'Ugtci, il y a quelques semaines, vous montiez au créneau pour tirer la sonnette d'alarme concernant la situation difficile que traverse la Côte d'Ivoire. Aujourd'hui, quel est l’état d'esprit des travailleurs de votre syndicat ?
J'aurais pu vous renvoyer cette même question parce que vous êtes journaliste, vous vivez les choses au jour le jour. Mais ce que je puis vous dire, c'est que dans la situation que nous vivons, notre travail a consisté à faire en sorte que nous ayons une sortie de crise apaisée. Pour la simple raison que jusqu'a maintenant, nous avons travaillé dans une certaine mesure parce que nous nous disons que nous sommes de toutes les organisations syndicales, la plus représentative. Ça veut dire que nous avons tous les courants au syndicat. Des lors, nous essayons chaque fois que nous le pouvons de consulter les uns et les autres avant de prendre une position. Donc notre position est médiane. Cela ne veut pas dire qu'en tant qu'individu, nous n'avons pas de position. Mais ma position personnelle ne compte pas. C'est celle des travailleurs qui compte. Alors pour répondre a votre question, je dois vous dire que les travailleurs sont extrêmement préoccupés de la" crise issue des élections. Nous avons pendant longtemps essayé de leur demander de prendre courage, patience et que la situation allait s'arranger. C'est par rapport aux entretiens que nous avons avec les uns et les autres. D'abord, nous avons rencontré des employeurs pour leur dire : Messieurs, la situation est difficile, soyez indulgents par rapport aux travailleurs. Parce qu'il va arriver des moments ou certains vont arriver en retard. II faudrait faire en sorte de ne pas en tenir rigueur. II y a d'autres qui risquent même de ne pas venir au travail parce qu'ils ont des problèmes. J’ai aussi un cas ou un travailleur est venu nous voir ici avec son bulletin de salaire pour me dire : « Monsieur, voila, j’ai 70 000F de salaire par mois. J’habite Marcory, je travaille à la Riviera. Chaque jour que Dieu fait je suis obligé de dépenser 2 000F pour aller a mon travail ». J’ai calculé, en un mois ça fait 60 000F. Il dit : « quand on m’enlève les impôts, la Cnps et tout qui s’ensuit, finalement, il ne me reste plus que 2000F ou 3000F. Je ne peux pas payer l’électricité. Je ne peux rien faire d’autre. Alors est-ce qu’il faut vraiment travailler ? » Voila comme dirait l’autre, une question « frar » pour moi. J’ai répondu : écoutez, je comprends mais vous ne pouvez pas rester à la maison. Il a dit : mais quand je sors, j’ai des risques, on ne sait jamais, il y a deux gouvernements. On a rigolé et on a dit : puisque vous avez deux gouvernements, vous aurez alors deux salaires par mois. Mais c'est plus grave que ça. J'ai du dire au camarade que je vais consulter mon bureau et tenir une réunion pour voir quelle décision il faut prendre. Parce que jusqu'a présent, nous nous sommes impliqués à la résolution de ce problème. Au cours de l'une de nos réunions, les camarades ont décidé unanimement que je puisse m'impliquer directement à la résolution de ce problème. Parce que nous avons eu l'impression que les hommes politiques ont atteint leur limite. Les uns et les autres se cramponnent sur leur position, les intérêts de la Côte d'Ivoire ne comptent plus. Et c'est dommage de constater cela.

Quelles sont les préoccupations actuelles des syndicalistes ?
Depuis près de deux ans, nous sommes rentres dans une négociation avec le gouvernement sur le Smig, sur les âges pour aller a la retraite a 60 ans et pas mal de choses. Des promesses qui n'ont pas été respectées. Donc, nous avons toute une liste pour laquelle nous sommes prêts à négocier. Chaque fois, nous avons des promesses. Nous nous sommes dit qu'a la sortie de la crise, toutes ces promesses vont être tenues. Fort de : cela, nous avons dit aux travailleurs de rester sereins car bientôt il va avoir des élections. Nous avons pris les Elections comme un repère. Donc, ce qui nous intéressait, c'est qu'on en arrive aux élections. A partir du moment où les élections ont lieu, on aura eu un interlocuteur et nous pourrions poser tranquillement nos problèmes. On réussirait donc il calmer les travailleurs. Maintenant a notre grand regret, voici les élections qui sont arrivées et qui ont rendu la situation encore plus compliquée. Du coup, nous-mêmes, nous sommes confondus, parce que nous avons cru aux élections. A l’heure ou nous sommes, nous ne sommes pas capables de dire à nos syndiqués ce que nous pouvons faire.

Pourquoi ne pouvez-vous pas leur expliquer ce qu'il y a lieu de faire ?

Parce que nous sommes devant un bicéphalisme. Certains même sont venus nous voir pour dire : il faut reprendre les grèves. J'ai dit oui mais il faut que je dépose un préavis de grève avant. Mais à qui faut-il déposer ce préavis de grève ? Si je le dépose à tel gouvernement, on me dira : vous avez déposé" ce préavis pour quoi faire ? Et l'autre gouvernement ? Alors à qui déposer ce préavis ? Nous avons affaire à deux gouvernements. Voila le problème.

M. le Secrétaire général, il y a eu une élection. II y a un vainqueur et un vaincu qui s'accroche au pouvoir. Que dites-vous aux travailleurs ?'
C'est la le gros du problème. Nous disons aux travailleurs que nous ne pouvons pas continuer de croiser les bras. C'est en cela que le comité exécutif m'a demandé de m'impliquer directement à la recherche de solution. Chose que j'ai faite en m'adressant dans un premier temps aux chefs el aux rois de ce pays. Nous avons envoyé une mission auprès des rois pour leur dire, qu'ils incarnent la tradition dans ce pays.

Quels rois et chefs avez-vous contactes ?
Ceux que je considère comme des vrais, pas ceux qui portent des casques. II y avait Nanan Boa Kouassi Ill. le roi du Zanzan, le roi Tanoé Amon du peuple N'Zima, le représentant du roi des Abouré de Moossou...Tous ces rois étaient la. Ils ont dit qu'ils se sont intéressés à cette affaire et qu'il y a tellement de divisions qu'ils sont fatigués. Mais puisque nous, nous revenons à la charge, ils vont se consulter et entamer un conclave. Qu'ils vont se dire la vérité. A savoir que le roi ne prend pas partie. Le roi dans un village est le papa de tout le monde et quand il y a des palabres, il cherche à trouver la solution. Je leur ai dit qu’ils ne doivent pas croiser les bras sinon la Côte d’Ivoire va disparaitre. Dans ma seconde démarche, je me suis adressé aux hommes de Dieu, aux guides, ceux qui parlent au nom de Dieu. Je leur ai dit, a eux aussi, qu'ils peuvent dire la vérité et qu'ils nous aide à trouver la solution.

Vous parlez des évêques qui appellent au respect de la souveraineté de la Côte d'lvoire ? Ceux disent non à une intervention de l’Ecomog ?
Ecoutez, vous savez qu'il y a une division entre ces hommes de Dieu. J'ai également écouté d'autres évêques qui ont dit autre chose. C'est dire qu'eux-mêmes ne sont pas clairs. Des lors, moi j'ai dit que j'attends les rois qui disent qu'ils vont venir dire la vérité. Ces jours-ci, je vais les rencontrer pour leur demander ce qu'ils .pensent de la situation. Quoiqu'il en soit, je constate que certains parlent de "Pays morts". De l'extérieur ou j'étais récemment, j’ai appris qu'il y a eu des tueries. Depuis que je suis rentré, j'avoue que je suis malade. Et je me suis interrogé : qu'est-ce qu'il faut faire ?

Est-ce que les travailleurs de Côte d'Ivoire vont au travail aujourd'hui?
Les travailleurs ne vont pas au travail. Certains partent au travail, la peur au ventre. D'autres m'ont demandé ... Je leur ai dit que quand il y a deux maux, il faut choisir le moindre mal. Je vois qu'il y a des tueries. Ce que je ne souhaite pas voir, c'est de verser le sang des Ivoiriens. Mais je pense que le sang a suffisamment été versé. Alors, je dis qu'entre verser le sang et ne pas aller au travail, je préfère dire aux gens de ne pas aller au travail. Je préfère dire aux gens: restez chez vous, comme ça vous évitez le risque de vous faire tuer. Si vous allez au travail, sur les 70 000F qu'on vous paye, vous risquez de ne gagner que 2 000F. Ça sert à quoi ? Mais pour prendre une position définitive, je vais réunir mon comité exécutif du bureau pour donner des instructions. A partir de ce qui va être décidé, je dirai exactement ce qu'il faut faire.

Qu’allez vous proposez ?
Je vais les mettre en face du risque qu’ils ont à aller au travail et rien avoir et rester à la maison. Ils vont choisir. S'ils veulent aller au travail pour avoir 1 000F et ne pas pouvoir payer leur maison et dormir dehors. Maintenant, s'ils veulent rester à la maison et attendre que les politiciens trouvent des solutions à leur bicéphalisme. Ce n'est pas aussi mauvais. Parce que moi j'ai besoin d'avoir un interlocuteur en face de moi. En tant que syndicaliste, mes camarades me demandent d'aller intervenir, il faut que je sache auprès de qui je dois intervenir.

Vous revenez d'une conférence internationale, qu'est-ce que vos confrères des autres pays pensent de la situation en Côte d'Ivoire ?
Je suis personnellement honteux en face de ces camarades. Parce qu'ils sont nombreux à m'interpeller: "Ade, quelle est cette histoire de bicéphalisme? II y a une personne qui se dit élue et il y a une autre qui se dit aussi élue. II y a une personne qui est soutenue par tout le monde entier et vous, vous continuez, à vous accrocher". Je dis : écoutez vous n'êtes pas sur place, nous avons nos problèmes à nous. Ils nous posent les problèmes de l'extérieur. Ils estiment qu'une seule personne ne peut allez contre celui qui a été reconnu par tout le monde. Et moi ma réponse, c'est de dire vous êtes à l'extérieur, nous, nous sommes à l'intérieur. Nous sommes en train de chercher une solution interne. Mais la solution interne, c'est laquelle : c'est le point d'interrogation. Je viens de vous dire que je vais," moi aussi poser la question en interne. De sorte qu'on dise: vous deux quittez le pouvoir, ce qui n'est pas juste non plus, ou restez tous deux ce qui n'est non plus pas juste. Nous allons trouver une solution. Mais laquelle ? Je ne peux pas aujourd'hui vous le dire parce que nous devons nous réunir. Nous allons nous dire: Voici l'état des lieux. On avance, on recule ou on décide.

Est-ce qu'on peut dire que la situation est catastrophique, parlant des travailleurs de I'Ugtci ?
Je ne sais pas s'il y a un mot plus fort que catastrophique. La situation est intenable. Des l'instant ou celui qui va travailler n'y va pas, ou y va difficilement, qu'il ne peut se nourrir pour avoir la force pour travailler, je ne sais pas le qualificatif à employer pour cela.

Avez-vous le sentiment que les salaires du mois de Janvier seront payes aux travailleurs ?
Ça., je ne peux pas le dire. Mais ce que je peux vous affirmer, il n'y a pas eu d'avance sur salaire comme cela se fait tous les 15 du mois.

Des travailleurs se disent menacés sur leurs lieux de travail avec des fiches de pointage qui ont été instaurées. Craignez-vous que certains soient licencies ou se voient octroyés un demi salaire du fait de la situation ?
S’il y a des demi-salaires, c’est quelque chose au moins. Mais je crains que certains n'aient pas de salaire du tout, II parait qu'en ce moment, les gens mettent l'argent dans les caisses pour pouvoir verser. II faut donc qu’ils parviennent à tout verser, et c'est avec le reste qu'ils vont payer les salaires des employés. A ce stade-la, je ne peux rien vous dire, il faut attendre à la fin du mois pour voir. Mais ce dont je suis sur, c'est que ceux qui perçoivent des avances sur salaire tous les 15 du mois, n'ont pu percevoir ces avances. Déjà à ce niveau, il y a quelque chose qui ne va pas.

Avez-vous déjà été saisi de cas de licenciement de travailleurs du fait de la crise du moment ?
Des cas de licenciement non, mais de chômage technique. Les gens nous ont parlé de chômage technique, et la, nous avons engage des discussions avec ces patrons pour leur dire, quand la situation ira mieux pour ces entreprises, ils doivent tenir compte des travailleurs qu'ils ont mis au chômage technique. Nous avons négocié avec les employeurs.

Vous avez organise une assemblée générale. A qui adressez-vous ses conclusions ?
On n'a pas à nous adresser à quelqu'un. Nous allons poser une question claire aux travailleurs. Nous allons leur dire, vous m'avez demandé de faire ceci, voila ou j'en suis, voila l'état des lieux, qu'est-ce que nous devons faire? C'est a eux de dire soit on part en grève jusqu'a ce qu'on ait un interlocuteur, soit on continue de travailler. C'est à eux de dire ce qu'il y a lieu de faire.

Les deux autres Centrales syndicales demandent à leurs adhérents d'aller au travail. Si voire base opte pour la grève, ne craignez-vous pas d'être noyés par les deux autres Centrales syndicales ?
Non, chacun se place la ou il est. Jusqu'a présent, nous avons travaille en bonne intelligence. Lorsqu'il est question d'un travail commun, nous avons toujours opté pour l'unité d'action. Quand je suis arrivé, effectivement, j'ai constaté qu'ils ont fait des réunions. J'ai demandé à mon adjoint si les camarades les ont contactés avant de tenir leurs réunions. II m'a été répondu non. C'est qu'ils n'ont pas besoin de nous. Ecoutez, le syndicat, c'est le syndicat. Jusqu'a présent, nous avons utilisé l'unité d'action lorsqu'il s'agit d'une affaire nationale. On se retrouve, on fait des calculs. Et chaque fois d'ailleurs, c'est nous qui sommes désignés pour être les porte-parole. Cette fois, ils ont estimé qu'ils peuvent aller tous seuls. Ils ont leurs raisons que je respecte. Je ne les condamne pas, je constate.

 

Est-ce que le ministre de la Fonction publique du gouvernement Gbagbo vous a déjà contacte ?
Chaque fois qu'un ministre à charge du travail est nomme, il nous fait appel. On va et chacun fait l'état des lieux. Mais pour l’heure, personne ne nous a contactés d’ailleurs, je ne connais pas mon ministre pour le moment. J’attends qu’un ministre m’appelle, me dise, « je suis le ministre du travail, quels sont vos problèmes etc. ». Dès l’instant où il y a deux ministres, j’attends. Je constate que les autres ont été appelés, et nous avons été laissés pour compte. Bon … Mais jusque-là, aucun des deux ministres ne nous a appelés.

Le ministre Gnamien Konan de la fonction publique a fait des communiqués pour inviter les travailleurs à ne pas collaborer avec le gouvernement illégitime de Laurent Gbagbo. Quelle est la réaction de l’Ugtci ?
Ça dépend de quel ministre on répond. Les fonctionnaires sont suffisamment lucides pour comprendre qu'ils ont affaire à deux ministres. Chacun prend ses décisions par rapport à ce qu'il croit être juste.

Etes-vous triste de cette situation que vit le pays ?
J'en pleure. Je me réveille au moins six fois chaque nuit. Quand mon épouse me voit assis au bord du lit, elle me demande : qu'est-ce que tu fais la ? Je lui réponds, je suis en train de réfléchir ou je suis en train de prier. Je n'ose pas lui dire la vérité, mais je suis très préoccupé.

Ne craignez-vous pas que Gnamien Messou vous taxe de pactiser avec le Rhdp ?
C'est son droit de me taxer de quoi que ce soit, mais c'est aussi mon droit de lui dire ou je suis. Pour le moment, je ne lui ai pas encore dit ou je suis. Je suis responsable syndicaliste, un point, un trait.

Quel est le message que vous avez a l’endroit de toutes les couches sociales ivoiriennes, de toutes les tranches d'âge ?
J'observe tout ce qui se passe, et c'est quand même triste. C'est triste parce que les deux candidats prétendent faire le bonheur des Ivoiriens qui détiennent chacun une parcelle de la souveraineté. Chaque Ivoirien qui va voter, détient une parcelle de la souveraineté. C'est l'ensemble de toutes ces parcelles qui constitue la souveraineté de la Côte d'Ivoire. Les Ivoiriens sont allés voter. D'après ce que nous savons, d'après les décomptes, il y a un qui a eu 54, 10% des voix. Pour une question juridique, il semble que l'autre qui n'a pas eu la majorité des voix, dit que c'est lui qui a gagne. Pour moi, ce sont des détails. Des l'instant ou on prétend faire le bonheur des Ivoiriens, et qu'a partir de cette élection, les mêmes Ivoiriens souffrent, les deux auraient pu dire, je veux travailler pour le bonheur des Ivoiriens, mais des l'instant ou ils sont en train de souffrir a cause de moi, si j'ai perdu, j'accepte le verdict des urnes. Et je donne un nouveau rendez-vous aux Ivoiriens dans cinq ans, je reviendrai à la charge. Les Ivoiriens ont décidé de choisir celui qui peut leur assurer le bonheur, je reviendrai à la charge. Mais la, je m'aperçois que c'est du bluff. Et c'est ça qui m'attriste. Tous sont d'accord, les Ivoiriens souffrent. Je ne suis pas d’accord. S’ils privilégient leurs intérêts personnels par rapport à l’intérêt de la Côte d’Ivoire, je dis, ce n’est pas honnête. Quand on est candidat à la présidence de la république, le minimum qu’on doit avoir, c’est l’honnêteté intellectuelle et agir selon ce que le peuple demande. Je suis triste.

Que dites-vous aux Forces de défense et de sécurité qui n’hésitent pas à tirer sur des ivoiriens aux mains nues ?
J’aime bien les militaires, mais je suis désolé qu’ils s’en prennent à des civils aux mains nues. Quand je suis arrivé de mon voyage, on m’a expliqué comment des civils aux mains nues ont été abattus. C’est vraiment triste. Je me demande si les militaires ont le sens de l’honneur, je m’interroge. Même s’ils reçoivent des instructions, mais le sens de l'honneur passe avant les instructions. Je souhaite, moi, que les militaires arrêtent de massacrer les civils, je voudrais qu'ils soient loyaux, républicains. Mais de la à aller nettoyer des citoyens, je dis non ! Aux femmes, je leur dis que tout le monde prie pour une sortie apaisée de la crise, mais on s'aperçoit plutôt que nous allons vers une sortie musclée. Ce n'est pas normal. J'avoue que je ne sais que dire, parce que je risque d'être méchant, or ce n'est pas mon genre. Aujourd'hui, la situation est telle qu'on est en famille mono-parentale. Ce sont les femmes qui élèvent les enfants. Elles ont de petites activités commerciales, mais malheureusement à cause de la situation, elles ne peuvent pas bouger. Qu'est-ce qu'elles vont faire de leurs enfants ? S'il y a des jeunes filles, qu'est-ce qu'elles feront ? La prostitution ? Est-ce cela la situation? Les femmes sont dans une situation de soumission. Elles sont assistées. Si celui qui doit les aider n'a pas les moyens, qu'est-ce qu'elles deviennent ? Aujourd'hui, on dit qu'il y a des difficultés à faire bouillir la marmite. Qu'est-ce qu'elles font ? On constate qu'il y a beaucoup de jeunes qui sont désœuvrés. II y en a qui ont fini leurs études depuis des années et qui sont dépassés par les techniques qu'ils ont apprises. Tout ce qu'on a aujourd'hui comme utilitaire, ordinateurs, électromécaniques, dans dix ans. C’est terminé. Comment on va les reprendre? II faut les reformer, les recycler, le; reformater. Mais si ceux-là n'ont rien à faire dans deux, trois, quatre ans, ils vont créer une rébellion. C'est dans cette situation qu'on est. Et on constate que certains s'accrochent. Alors qu'en fait, tout le monde sait compter. Ce n'est pas mathématique, c’est arithmétique. C’est un plus un. Mais malheureusement, on s’accroche, on fait des artifices et c’est le pays qui s’enfonce. C’est cela la réalité. Pour les jeunes, il est bon qu’on sorte de cette situation. C’est à eux qu’on va confier le pays demain. Si par contre eux, ils ne peuvent rien faire demain. Qu’est ce qu’on laisse en héritage à nos enfants ?

Beaucoup d’ivoiriens se plaignent de la Télévision nationale, surtout de la redevance qu’ils payent sur chaque facture d’électricité. Comment appréciez-vous le rôle de la Rti ?
La télévision, c’est autre chose. Le drame, c’est qu’en fait, on parle de liberté. Les journalistes se battent pour la liberté de la presse. Mais pour celui qui a accepté de prendre un bouquet, et qui à différents canaux pour avoir des informations, on constate qu'il est frustré. Pourtant, il paye une redevance et il a droit à l'information. Sur une des déclarations que nous avons faites, nous avons demandé qu'on libère les medias. On dit, une seule hirondelle ne fait pas le printemps. Donc, si vous parlez, donnez-moi l'occasion d'écouter d'autres versions pour que je fasse mon jugement de valeur. Mais malheureusement, il y a des chaînes, France 24, Africa 24 qu'on ne voit plus. Et en fait on nous sert quoi ? On nous sert un seul son de cloche. On ne va pas dire qu'on n'est pas aux ordres. La difficulté aujourd'hui est-ce qu'on est dans le cadre de notre propre liberté? On dit qu'on nous a libérés, que la parole est libérée, mais on ne voit pas cela puisqu'on ne peut pas parler. Vous parlez, vous avez quelques problèmes, quelques soucis. La presse en elle-même est bâillonnée. II faut permettre à chacun d'avoir son libre jugement. Non seulement, nous payons la redevance, mais nous n'avons pas l'information. Le drame, on paye 2 0O0F de redevance, et on n'a pas droit d'avoir la possibilité d'être informé d'être éclairé. Depuis le temps qu'on cotise, il semble que le matériel est obsolète. Peut-être que l'argent ne suffit pas, mais qu'on nous dise combien ça fait. Parce qu'a la vérité, les autres télés, les autres medias ont évolué. C’est dommage qu'on soit encore à la traine!




Interview réalisée par PATRICE YAO, PAUL KOFFI et DIARRASSOUBA SORY

 
©Copyright Site Internet de l'UGTCI- Octobre 2007 -Webmaster